Opposition politique et société civile sont vent debout contre le président Alpha Condé. Elles dénoncent d’une seule et même voix le report des élections locales ainsi que les velléités supposées du président de modifier la constitution afin de se maintenir au pouvoir.
Dimanche, un meeting de l’opposition a eu lieu à Kaloum, dans le calme.
« L’opposition républicaine se félicite du déroulement de son meeting, pointe GuinéeNews. Aucun incident grave n’a été enregistré. […] D’autres meetings sont prévus les semaines à venir dans les communes de Matam et de Ratoma. Ainsi que des rencontres de sensibilisation sur la grande marche pacifique du 2 août prochain. »
« Au lendemain de ce meeting réussi, l’opposition au régime du professeur Alpha Condé se renforce ! », relève le site d’information GuinéeMatin. En effet, hier lundi, précise-t-il, « le chef de file de l’opposition guinéenne, Cellou Dalein Diallo, a enregistré le retour de cinq partis politiques. »
Hier, lundi, c’était au tour de la société civile de manifester, et là, les choses se sont moins bien passées… Comme le constate Ledjely.com : « elle se voulait symptomatique du ras-le-bol des Guinéens face à un certain nombre de dérives de la part du régime incarné par le président Alpha Condé. Elle se voulait également une démarche totalement citoyenne parce que n’étant officiellement adoptée par aucune entité politique. Mais la marche qu’avait appelée Elie Kamano, le célèbre reggaeman guinéen, a tout simplement tourné court. Le principal initiateur lui-même ayant été mis aux arrêts, quasiment au point de départ. […] Le motif de cette arrestation serait lié au fait que la marche n’ait pas été autorisée. Le gouvernorat invoquerait un vice de forme dans la procédure pour justifier l’opposition à la marche, alors même que le meeting de l’opposition républicaine de dimanche avait été autorisé. »
Interrogée hier soir par le site d’information Aminata, l’épouse d’Elie Kamano, Djénédine Kouyaté se dit « écœurée » et demande la libération immédiate de son mari.
Condé pas fondamentalement différent de ses prédécesseurs ?
Ce bras de fer entre le pouvoir guinéen d’un côté et l’opposition politique et la société civile de l’autre suscite bien des questions dans la presse ouest-africaine…
Ainsi, pour Le Pays au Burkina, « pour qui connaît le parcours du chef de l’Etat guinéen, opposant historique aux différents régimes qui se sont succédé en Guinée depuis Sékou Touré jusqu’à Moussa Dadis Camara, il y a lieu de se poser des questions face à tous ces griefs que lui font l’opposition et la société civile. Et pour cause. L’accession du professeur Alpha Condé au pouvoir en Guinée, en 2010, avait suscité bien des espoirs. […] Mais après un mandat et demi de gestion, force est de constater que l’ex-opposant historique n’est pas fondamentalement différent de ses prédécesseurs. Et la fébrilité dont il fait montre lorsqu’on aborde la question du troisième mandat qu’on lui prête en dit long sur ses intentions réelles. Dans le cas d’espèce, Alpha Condé ne semble pas mieux briller que ses prédécesseurs en matière de respect des libertés démocratiques. »
Et Le Pays de prévenir : « Alpha Condé risque de rater son rendez-vous avec l’Histoire, au moment de joindre la parole à l’acte pour donner une belle leçon de démocratie au monde entier. Et si la Guinée devait s’embraser à cause de ses velléités monarchistes, il en porterait l’entière responsabilité. »
« La mode des troisièmes mandats est sans frontière, renchérit Wakat Séra, et fait surtout des adeptes dans une Afrique que certains finiront par se donner raison de dire qu’elle n’est pas mûre pour la démocratie. Si le phénomène est combattu avec la dernière énergie par les opposants, dès que ceux-ci se retrouvent sur l’autre rive, ils embrassent aussi cette religion dans laquelle le pouvoir ne se conjugue jamais au passé. […] La Guinée de Alpha Condé ne fait pas exception à la règle, soupire encore le site burkinabé, les opposants et animateurs de la société civile exprimant leur ire contre ces proches du président Condé qui élaborent toutes sortent de stratagèmes pour offrir un troisième mandat à leur porte-étendard. Dans cette option de pouvoir à vie, c’est naturellement la Constitution qui sera encore rudoyée, retournée dans tous les sens, et charcutée pour donner une légalité à une entreprise sordide et illégitime. »
RFI